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Aujourd'hui, je vous présente l’artiste Florence Friedrich qui transforme la fragilité en force, l’intime en univers. C’est dans l’ambiance chaleureuse et accueillante de son atelier à Chailly, un quartier de Lausanne, que j’ai eu la chance de rencontrer cette créatrice, dont l’œuvre se déploie au fil de ses émotions les plus profondes. Mère de trois fils, elle a su conjuguer sa vie de famille et sa passion artistique, tout en laissant son art devenir le reflet de son parcours personnel. Un parcours marqué par une épreuve intime, le cancer du sein, qui a profondément influencé son travail actuel. Elle m’a confié que chaque trait, chaque nuance de couleur sur le verre, chaque couche de matière dépeint ce combat
intérieur. C’est dans la douceur et la transparence de ce matériau fragile qu’elle a trouvé un moyen d’exprimer l’invisible, de donner forme à l’invisible, comme des ramifications qui naissent du cœur. Chaque œuvre est un voyage, un passage du corps à l’âme, une recherche de beauté dans la vulnérabilité. Rencontre.

 

Florence travaille par séries, des titres comme "Chimères", "Île", "Stèle" ou encore "Tête" viennent illustrer des paysages mentaux et des états d’âme, souvent marqués par un mouvement fluide et organique. L’encre et la plume, ainsi que l’acrylique ou l’aquarelle, prennent vie pour former des dessins délicats et puissants à la fois. Fascinée par les radiographies médicales et les couleurs qu’elles dégagent, elle perçoit les plaques de verre comme celles de microscope qui révèlent un monde fascinant et inspirant. Chaque pièce de verre devient un support où le temps, l’attente de séchage et le travail de retouches se mêlent harmonieusement. Ses œuvres, qu’elles soient des petites pièces ou de plus grandes compositions, évoquent parfois des nervures placentaires, me dit-elle, ou la représentation d’une île perdue dans un vaste océan. Sa première exposition, intitulée « In Vetro », s’est tenue à la galerie du Voisinand à Lutry, la deuxième à Ôse Thérapie à Lausanne, un clin d’œil à son processus créatif où chaque œuvre naît de couches successives évoquant à la fois la fragilité du corps et les cicatrices de la vie.
 

Depuis son plus jeune âge, elle a toujours créé. Sa formation initiale se concentre sur l’histoire de l’art conjugué aux Beaux-Arts. Elle a suivi un programme à l’ECAL à Lausanne à côté de ses études universitaires, qui lui permet de lier théorie et pratique. Aujourd’hui, en parallèle de son activité artistique, elle travaille comme médiatrice culturelle à la
Fondation de l'Hermitage à Lausanne. Elle a appris la technique des encadrements au Musée Jenisch à Vevey, lors de son emploi de plusieurs années à la Fondation Oskar Kokoschka où elle a assuré l’inventaire des œuvres appartenant à la veuve de l’artiste, ainsi que le commissariat de plusieurs expositions consacrées à Oskar Kokoschka (1886-1980). Ces expériences muséales et techniques font partie de son approche soignée et méticuleuse du travail artistique. Les influences de son passé sont présentes dans ses œuvres : ses deux parents dessinaient beaucoup, et elle se souvient que sa mère peignait beaucoup à l’aquarelle, un souvenir précieux qui nourrit aujourd’hui ses inspirations et son attrait pour les matières fluides. L’un de ses fils, âgé de douze ans, s’intéresse également à cette technique, ce qui crée une
belle complicité entre eux. Très jeune, elle peignait chaque semaine dans un atelier Arno Stern, où la liberté et l’imagination sont mis à l’honneur, et cela a duré quinze ans, me dit-elle. Aujourd’hui Florence a elle-même créé un atelier du même type à Lausanne, l’atelier La Trace, où elle accueille des groupes d’adultes et d’enfants.

 

À travers ses œuvres, elle continue de raconter son histoire, de revendiquer sa place d’artiste et d’explorer la mémoire et le corps. Son art est une rencontre entre fragilité et force, entre souvenirs et découvertes. Profondément marqué par le vécu personnel, il est une exploration des zones de fragilité et de résistance qui composent l’existence humaine. À la croisée de l’intime et de l’universel, ses œuvres deviennent un miroir, une invitation à la contemplation et à la réflexion sur notre propre existence et résilience. Dans chaque série, chaque geste, elle nous offre un espace de partage et de beauté, une expression de l’âme qui se fait tangible, et une empreinte du temps qui passe.

Autrice : Marie Bagi, docteure en Histoire de l’art contemporain et Philosophie

 

Publié le 2 février 2025

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