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*** Lumière sur une artiste ***

Marie Bagi vous présente,

 Isaline 

Illustratrice

            Aujourd’hui je vous présente l’artiste illustratrice Isaline que j’ai eu le plaisir de rencontrer au Café de Grancy et qui m’a confié, sans pudeur, son chemin vers l’art et son besoin constant pour la création. Rencontre.

Isaline est née à La Côte et issue d’une famille rurale. Elle passe son temps dehors à jouer. Elle ne se destine pas tout de suite à une carrière artistique. Pourtant, depuis enfant, la passion du bricolage était présente surtout lorsqu’elle pouvait intervenir dans la nature – les prémices du Land Art. A l’école, c’est une enfante timide et introvertie. Étant très préoccupée par la cause sociale, elle se lance dans des études d’éducatrice de l’enfance et travaille durant dix ans dans ce domaine. Son premier stage, elle l’effectue à Lavigny où la créativité continue son chemin. En effet, elle me dit qu’elle adorait créer avec les enfants. Ce qui l’amènera par la suite vers le collage qui est une forme de recyclage. En 2009, elle part à Rome faire un voyage linguistique. Elle y reste trois mois et y rencontre son mari. C’est là qu’elle découvre l’art classique grâce à des visites, des livres et des courses d’histoire de l’art. C’est une révélation. Elle s’inscrit à l’équivalant de l’université populaire, où il n’y a que des personnes âgées me dit-elle en riant, afin de suivre des cours d’archéologie et de pratiques artistiques comme le nu et l’aquarelle. En 2013, elle réalise sa première exposition. Fin 2014, elle retourne à Rome et se lance dans des études d’illustration à Trastevere. Ses professeurs sont illustrateurs affirmes et lui transmettent une culture incroyable. Elle fait cette formation durant trois ans. De retour en Suisse en 2018, avec la difficulté de trouver une place en crèche pour son fils Émile, Isaline ne trouve que peu de temps pour la création. Elle sent la frustration alors monter.

Illustratrice indépendante, elle crée par le biais du collage des personnages animaliers issus de notre enfance tels que des crocodiles. Pourquoi ces collages ? Et bien, me dit-elle, c’est qu’elle possède une passion pour la matière. Mais pas seulement la matière en elle-même, c’est aussi le geste réalisé, la découpe du papier, par exemple. Le toucher est extrêmement important ajoute-t-elle. C’est pour cela qu’elle a toujours les mains sales, dit-elle en riant. Elle a, au fur et à mesure des années, acquis une certaine expérience des techniques et aime être à la recherche d’une structure. Elle aime réaliser en grand avec la spatule. Ses projets lui viennent au hasard d’une intuition qui lui apparaît. Elle passe du crayon au collage, et parfois décollage, afin de présenter un résultat tiré de son inconscient. Elle me dit être parfois surprise du résultat. L’illustration c’est comme une évidence en rapport avec le métier qu’elle a pratiqué. Elle voulait faire des livres pour enfants. Elle a déjà réalisé deux histoires avec des illustrations. Il y a comme un croisement, une évidence entre son métier passé et son métier actuel. Et si elle a le malheur de ne pas pouvoir aller à l’atelier, elle a mal au ventre, me confie-t-elle. Elle ajoute que parfois, quand le week-end arrive, elle s’exclame : « Ah zut ! Déjà ! ». Lorsqu’elle crée, elle pense toujours à un nouveau projet. C’est toujours en ébullition dans son esprit. Des cartes postales et des illustrations sur toile avec collage agrémentent son œuvre. Le collage lui prend un certain temps et les émotions qui s’en dégagent sont extrêmement intenses. Étant très réceptive à ces dernières, elle les laisse œuvrer en laissant transparaître ce qui vibre en elle. Que ce soit certaines détresses, des certains vécus ou du tragique, elle les laisse s’exprimer. La vibration transparaît également lorsqu’elle fait les gestes de découper ou encore de déchirer. N'aimant pas ce qui est lisse, elle souhaite du relief et le trouve avec cette technique. Le superflu ou encore le trop esthétisé dans l’être humain ne lui parlent guère. Elle aime le contact avec ceux qui ont un vécu marqué et singulier avec des contours, tout comme ses collages. Sa sensibilité à l’autre est accrue depuis son expérience dans le social et donc elle souhaite que ce côté-là ressorte dans son travail. Certaines personnes iront lui demander pourquoi elle ne fait pas des choses plus plaisantes. Elle n'hésite pas à répondre qu’elle ne va pas réaliser des choses qui ne lui correspondent pas. En effet, lorsque l’être artiste est présent, il ne doit pas être influencé ou dirigé mais compris. Elle sent qu’il y a une certaine évolution dans son travail mais qui lui correspond, un chemin qu’elle a envie d’emprunter qui sort d’un besoin et d’une redécouverte de soi.

Elle commence enfin à être prise au sérieux et son mari est d’un soutien sans faille. Lui-même étant sensible à l’art, cela l’a aidée à faire son « coming-out » artistique. Il est important pour un.e artistes d’être soutenu.e et Isaline a beaucoup à offrir autant aux petits qu’aux grands. La passion qu’elle met dans son œuvre se ressent lorsque nous l’entendons parler. Son être artiste ayant été toujours présent, il a fallu un contact accru avec l’art à Rome pour se rendre compte de l’importance de ce dernier et pour lequel elle ne fera plus de sacrifice professionnel mais continuera de suivre son chemin artistique qu’elle maîtrise avec talent.

 

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Autrice : Marie Bagi, docteure en Histoire de l’art contemporain et Philosophie

 

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Publié le 1er juin 2023

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