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Aujourd’hui, je vous présente l’artiste Julianne Mary que j’ai rencontrée dans l’atmosphère chaleureuse du Café de Grancy à Lausanne. Ses propos, aussi réfléchis que sensibles, m’ont permis de découvrir un parcours à la fois riche et atypique, où la passion pour l’art et la création se mêle à un cheminement personnel profond. Enseignante, graphiste et artiste dans l’âme, elle transforme ses émotions et son monde intérieur en dessins et créations visuelles, à la fois intimes et libérateurs. Son art, elle le conçoit comme un refuge, un espace où se rencontrent ses diverses influences et où elle peut véritablement être elle- même. Rencontre.

 

Dès nos premiers échanges, elle partage son parcours atypique et riche en nuances. Enseignante en français et histoire au secondaire I depuis cinq ans, elle est également graphiste de formation, diplômée de l’ERACOM (école romande d'arts et communication). Son lien avec l’art est intime, viscéral, un refuge personnel qu’elle cultive depuis l’enfance. Dessiner, c’est une mise en forme de mon monde intérieur, me dit-elle, évoquant avec tendresse ses premiers croquis d’animaux, inspirés par la nature et l’observation.

 

En 2017, elle a co-fondé le collectif Marcelle, qu’elle a quitté depuis, et fait partie, depuis 2010 avec un petit temps de pause, de l'association PBK9. Cependant, elle refuse de se soumettre à la pression de devoir vivre de son art car elle ne s'en sent pas capable - encore la question de le légitimité en jeu. S’exposer, c’est super intime, confie-t-elle, insistant sur son besoin d’un espace où elle peut être pleinement elle-même. Sa quête artistique s’inscrit dans une démarche personnelle et sincère, un moyen d’exprimer ses émotions et de les coucher sur papier.

 

Son parcours a été jalonné d’expériences marquantes. Ses parents l'ont toujours poussée à créer et dessiner, son père venait alors voir ses expositions au gymnase. D'ailleurs, enfant, elle était dans une crèche créative, axée autour de l'art. Mais ses parents pensaient aussi qu'il fallait trouver une voix professionnelle plus sûre que l'art. L'art était à envisager comme un "à côté". Au gymnase, elle s’inscrit à des cours du soir avec Olivier Saudan, artiste lausannois, où elle découvre les modèles nus et commence à expérimenter la peinture – un médium qu’elle n’aimait pourtant pas enfant, préférant alors le noir et blanc. Marquée par un burn-out en 2014, elle quitte Lausanne pour Sainte-Croix, où un été de marches et de retrait créatif lui permet de se recentrer. Cette pause devient un tournant : elle se forme à l’animation d’ateliers créatifs, un processus qui l’aide à mieux se comprendre en tant qu’artiste.

 

Elle travaille aujourd’hui au stylo noir fin, explorant petits formats comme ses carnets A4 et A5, où les dessins débordent souvent sur les bords des pages. Ses créations récentes incluent des œuvres grand format, comme son premier mural réalisé pour Mirage Réel en novembre 2024, une expérience enrichissante où textures et surprise occupent une place essentielle.

Son inspiration se nourrit de ses environnements. Depuis 2021, elle passe ses étés dans un chalet d’alpage, elle observe un glacier, qu’elle explore en diverses versions. Actuellement, elle s’intéresse au lichen et au végétal, qu’elle imagine fusionner avec l’humain ou l’animal, exprimant un attrait pour l’hybride et la connexion entre les mondes. Elle vit à Grandson, un lieu qu’elle apprécie pour sa proximité avec la nature, un aspect essentiel de sa pratique.

 

Son art met souvent les femmes à l’honneur, une volonté affirmée de les représenter et de leur donner la place qu’elles méritent. Dans ses œuvres, elle conjugue technique et émotions, laissant toujours une part à la surprise et à l’instinct. Elle couche ses émotions sur papier, mais elle laisse une ouverture pour ce qui peut surgir, m’explique-t-elle, un

sourire dans la voix.

 

Ainsi, Julianne nous invite à plonger dans un univers à la fois fragile et puissant, où chaque trait de stylo est le reflet d’une émotion vécue, d’une expérience de vie ou d’une observation du monde. À travers son travail, elle explore les frontières entre le réel et l’intime, cherchant à représenter le monde tel qu’elle le ressent, tout en laissant une place à la surprise et à l’inattendu. Avec ses dessins, souvent empreints de nature et d’humanité, elle nous offre une invitation à la réflexion, à l’évasion, et à une exploration de nos propres émotions.

Autrice : Marie Bagi, docteure en Histoire de l’art contemporain et Philosophie

Publié le 2 février 2025

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